* Ogée (1780) : "L'ancienne ville ou cité
de Lexobie était située dans cette paroisse, à la pointe de la
rivière de Leguer; cette ville, qui fut le premier siège des
évêques de ce diocèse, fut détruite, dans le IXè siècle, par
l'armée de l'empereur Charlemagne. On y trouve des ruines qui
semblent favoriser cette conjecture. On a construit une chapelle
pour rappeler à la mémoire que c'est le premier siège des
évêques de Tréguier". |
*****
* Fréminville (1837) : "Au-dessous de Lannion, en allant vers la côte,
à l'embouchure de la rivière du Guer, existait une de ces grandes et antiques cités, dont parlent si souvent les vieilles traditions
bretonnes, et qui sont aujourd'hui entièrement effacées de la surface du sol. Celle-ci portait le nom de
Lexobie et n'était pas moins renommée, selon nos légendes, que les villes
d'Is, de Tolente, d'Occismor, etc., dont nous ne connaissons plus que les noms et dont les positions mêmes sont douteuses. Plus respectée pourtant que ces dernières, par la faux
destructrice du temps, Lexobie a laissé quelques vestiges qui peuvent du moins fixer avec certitude le lieu où elle s'élevait jadis, du moins s'il faut s'en rapporter à quelques personnes, qui croient en retrouver les restes près du village de
Coz-Gueaudet, dans quelques fondations de murs et l'entrée d'une espèce de caveau. Pour nous, tout en accordant l'existence passée de la cité de
Lexobie, au lieu où on la place encore aujourd'hui, nous n'oserons rien affirmer d'après des vestiges si vagues et si peu significatifs. Les historiens
fixent l'époque de sa destruction au huitième ou au neuvième siècle. Selon Le
Baud, elle aurait été saccagée en 836, par Haston ou Hasting, célèbre chef Danois. Mais il paraît que cet auteur se trompe et qu'il prend ici le sac de Tréguier pour celui de
Lexobie; selon Ogée, cette cité aurait été prise en 786, par un des généraux de Charlemagne, et ensuite totalement rasée. C'est l'opinion la plus fondée et la plus généralement adoptée". |
*****
* Marteville et Varin (1843) : "La partie la plus
intéressante de Ploulec'h est le village de Guyaudet, ou mieux d'Yaudet, où quelques antiquaires
ont voulu placer l'ancienne Lexobie, ville principale des Lexoviens. Le premier auteur de cette idée semble être le
père Lebaud, qui dit, dans son Histoire de Bretagne : «Les Trocorenses sont les peuples qui occupent les
lieux d'iceux que Jules appelait Lexobiens........... D'eux font mention Pline-Second et Strabo, en leurs œuvres,
où ils les appellent aussi Lexoviens. Et les nomme Pline premièrement entre les peuples de Gaule
Lugdunense; et estiment aucuns, mêmement Nicolas de Germanie, que ce fussent ceux de Lizieux, qui est cité épiscopalle, en
la province de Rouen, pour la similitude du nom, qui est dit en latin
Lexovium. Mais ces Lexovienses étaient ainsi nommés de leur cité de Lexoviense, laquelle était
située sur la rive de la grand mer, en la partie de septentrion, en un lieu que les Trecorenses nomment en
leur langue Cozqueondet, qui est interprété vieille cité, où
jusques à maintenant en apparent les vestiges.» — Cette assertion, répétée par les auteurs qui ont écrit après Lebaud, a passé parmi les faits reçus, a tel point qu'il importe de la
combattre et de la réduire à sa vérité géographique. Pline et Strabon, que cite le chanoine Lebaud. nous serviront mieux ici que tous autres à le combattre. Pline, le
premier, parle en effet des Lexoviens, dans sa description de la seconde Lyonnaise, mais voici en quels termes :
" Lugdunensis habet Gallia Lexovios, Vellocassos, Galletos,
Venetos» (lib. IV, ch. 82. ) « La Lyonnaise gauloise «comprend les Lexoviens, les
Vellocassiens, les Galètes et les Venetes.» Or il faut remarquer que Pline, dans ses descriptions, part du nord, et termine presque toujours par le midi,
dans ce cas, il est évident qu'il place les Lexoviens à l'est de l'embouchure de la Seine, la partit la
plus nord de la seconde Lyonnaise. C'est aussi ce qu'exprime nettement Plolémée en ces termes : «
Les Caleti occupent le côté nord du fleuve Seine; leur cité est
Juliobona (aujourd'hui Lillebonne); après eux les Lexoviens (metous
oi Lixouboi ). » Les Calètes occupaient donc la rive droite de l'embouchure de la Seine, et les Lexoviens la rive gauche. C'est en effet ce qu'exprime
Strabon lui-même. Cet autour, parlant des avantages que présente le midi de la Gaule, qui, par les fleuves, peut
alternativement jeter ses produits dans les deux mers, suit ce mêmes produits remontant le Rhône, puis
au besoin le Doubs, enfin gagnant la Seine par terre, suivant ce fleuve jusqu'à l'Océan, entre
les Lexoviens et les Calètes et gagnant la Grande-Bretagne en moins de deux jours. —
Il n'en faut pas davantage pour confirmer ce qui est admis par les auteurs sérieux, à savoir, que les Lexovien étaient, non un peuple de la Petite-Bretagne, mais le peuple
dont la ville principale était Lizieux, appelée alternativement
Noviomagus et Lexosiorum civitas. — II reste donc
ici un seul fait, c'est la tradition qui rapporte qu'il y a eu une ville à l'endroit dit aujourd'hui
Coz-Yaudet et selon Mr. de Blois Coz-Keodet, qui signifierait vieille cité (nous ne savons par quelle transformation de mots). Mais que ce soit
Lexobie, nous ne saurions l'admettre un seul moment. — Quoi qu'il en soit, la chapelle d'Yaudet a été créée, en
1832, chapelle de secours. Le curé de Ploulec'h veille à ce que l'exercice du culte y ait lieu, et perçoit la moitié des offrandes qui y sont
faites. Cette petite chapelle est en grande vénération, et de tout le pays environnant les marins s'y rendent en pèlerinage pendant le mois d'août, — La grève qui se déroule en avant
d'Yaudet est dangereuse par ses sables mouvants. On rapporte qu'en 1828 une réunion de
jeunes gens descendait sur la grève, quand tout à coup le sol s'abîma
sous les pieds d'une jeune fille. Son fiancé se précipita après elle, la rejeta sur la grève, mais fut englouti à sa place, ainsi qu'un autre jeune homme qui l'avait aidé dans sa courageuse
entreprise". |
*****
* Pitre-Chevalier (1844)
:
Le point rouge a été
rajouté par JC Even.
On remarquera sur cette
carte de nombreuses données aujourd'hui caducques. |
*****
* Benjamin Jollivet (1859) : "Notre Dame de
Coz Yaudet est une petite chapelle située près du village de ce
nom. On croit communément qu'elle a été érigée avec des
matériaux provenant de l'ancienne cathédrale de Lexobie pour
rappeler le souvenir de celle-ci. Ce serait, suivant la tradition,
la plus ancienne chapelle dédiée à la sainte Vierge dans toute
l'Armorique. Un poëte a écrit sur la ruine de Lexobie,
qu'il place comme nous à Coz-Geaudet, et sur la chapelle qui nous
occupe, les vers suivants :
"Elle a disparu, Vierge sainte;
Ton culte seul subsiste.
A la faux du temps ton enceinte,
malgré l'Impie, a résisté.
L'œil cherche en vain sur ces collines
Et Lexobie et ses remparts;
Le soc sillonne des ruines;
Ton temple brille à nos regards". |
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* Anonyme (1860) : "L'église paroissiale est sous le patronage de saint Pierre. Son abside à trois pans est du
XVI» siècle. Elle renferme le tombeau du père Nault, missionnaire,
docteur en Sorbonne, décédé en 1709 et né à Ploulec'h. - La commune possède les chapelles du
Saint-Lavant, de Sainl-Herbaud et de Notre-Dame. Celle dernière est très
vénérée dans le pays. - Près de cette grève (du Yaudet) et sur la falaise qui la domine, s'étend le village de Coz-Yeaudet, bâti sur l'emplacement d'une ville gallo-romaine, laquelle, à en juger par les débris dont le sol est couvert et les anciennes voies qui y conduisent, a dû être
très importante aux IIè, IIIè et IVè siècles de notre ère. Le nom de ce village, en effet, indique qu'une ancienne cité a existé là,
et jusque dans ces derniers temps, tous les auteurs qui s'en sont occupés ont admis sans conteste, sur la loi de quelques légendaires, qu'elle s'est appelée Lexobie
et qu'elle a même été le siège d'un évêché jusqu'à la lin du
IXe siècle, époque à laquelle elle aurait été prise d'assaut et
saccagée par les Normands. Mais devant le manque absolu de documents
certains, la critique historique moderne rejette tous ces récits, pour se
borner à constater l'antique importance de Coz-Yeaudet et appeler en même
temps les investigations des savants sur le peu qui reste actuellement de constructions gallo-romaines, réduites a quelques pans de murailles,
bâties en moyen appareil. Nous ajouterons que, dans notre pensée, la destruction de celle ville doit
être bien antérieure au IX° siècle; car parmi les nombreuses monnaies romaines qui
ont été trouvées dans le pays environnant, aucune n'est postérieure, du moins à noire connaissance, à Julius
Valens, qui parvint à l'empire en l'année 317. - Naguère existait,
au milieu du village de Coz-Yeadet, une assez vaste chapelle XVIè siècle, dédiée à la sainte Vierge; elle était
à deux nefs, très délabrée, mais ne manquait pas de caractère. Au lieu de la réparer
et consolider telle qu'elle était, on a préféré la détruire pour ériger à sa place un édifice
tout neuf, mais qui ne vaudra jamais l'ancien". |
*****
* J. Rigaud. (1890) : "C'est près de cette
chapelle, non loin de la grève, que s'étant le village de
Coz-Yaudet, bâti sur l'emplacement d'une ville gallo-romaine,
appelée Lexobie, d'après légende, et qui aurait été le siège
d'un évêché. Vers 836, un chef normand du nom de Hasting, vint
débarquer à l'embouchure du Guer et assiégea la ville. Après
avoir repoussé plusieurs assauts, les habitants furent obligés de
se rendre et furent tous massacrés.
Si l'histoire de Lexobie est une fable, il est toutefois
impossible de nier qu'à cet endroit ait existé, sous la domination
romaine, un établissement important. Quiconque visite le Yaudet,
examine les débris des fortifications, ne doute pas un instant que
les conquérants de la Gaule n'y aient séjourné; situé sur la
pointe d'un promontoire abrupt, et défendu du côté de l'est par
un rempart en terre, Coz-Yaudet montre sur les autres côtés les
restes d'une muraille gallo-romaine qui complétait se
défense. On y a trouvé des briques à crochets, des fragments de
vases, de petites meules, des monnaies gauloises et même quelques
pièces carthaginoises". |
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i
Extrait de Patrick GALLIOU :
l'Armorique romaine.
Couleurs ajoutées par JCE :
rouge : Vorgium / Carhaix; mauves : Vetus Civitas / Le
Yaudet et Landreger / Tréguier |
*****
i
Extrait d'Alain LE DIUZET,
dans Mouez ar Vro. 1960
Point rouge : Vorgium
/ Carhaix; points mauves : Vetus Civitas / Le Yaudet et
Landreger / Tréguier |
*****
* Pierre Barbier (1960) :
- pages 37-38-39 : "Tugdual entreprit d'aller à Paris trouver le roi franc Childebert afin de faire confirmer par celui-ci les donations de paroisses qui lui avaient été faites en Domnonée. Malgré l'autonomie à peu près complète dont jouissaient les souverains des petits
États d'Armorique, les rois francs représentaient en quelque sorte le pouvoir central, héritier de l'Empire Romain disparu. Il est accompagné dans ce voyage par un personnage influent, «
dominus Albinus », lequel ne serait autre que saint Aubin, évêque
d'Angers. Ce voyage se serait situé entre les années 540 et 545. De toute façon, cet épisode de sa vie permet de situer nettement la date de l'apostolat de notre saint en
Armorique, durant la première moitié du VIè siècle, Childebert Ier ayant été roi de Paris de 511 à 558.
Pour des raisons politiques faciles à comprendre, les rois francs s'érigeaient volontiers en protecteurs de l'Église; en Bretagne surtout, en protégeant le clergé, ils se créaient de la sorte un point d'appui et un moyen de surveillance contre les « tyerns » ou rois bretons qui étaient pratiquement indépendants. Aussi réservaient-ils le meilleur accueil aux évêques et aux moines venant solliciter leur soutien; les vies des saints bretons nous
apprennent que plusieurs de ceux-ci imitèrent Tugdual, ce qui d'ailleurs ne laisse pas de nous surprendre, puisque d'un autre côté le clergé breton ignorait à peu près totalement le pouvoir spirituel romain. Le roi franc confirma les donations
faites au monastère de Tréguier, et de plus il fit sacrer Tugdual évêque,
C'est donc investi de la dignité épiscopale que celui-ci reprit le chemin du retour au Val-Trécor.
C'est ici que le rédacteur de la « Vita Tertia » de saint Tugdual, qui peut être datée avec certitude du
XIè siècle, fait mention de l'évêché de Lexovium, dont la première et la deuxième vies ne parlent aucunement. L'événement, tel qu'il nous est raconté par l'hagiographe.
peut se résumer ainsi : Tugdual, revêtu des fonctions épiscopales, est sollicité à son retour à Tréguier par une députation de Lexoviens venus lui apprendre la mort de leur évêque et le prier d'être son successeur. Tugdual accepte, il est reçu triomphalement dans la ville épiscopale de Lexovium, mais, peu de temps après, celle-ci ayant été détruite, il transfère le siège dans son monastère de Tréguier. dette histoire est évidemment suspecte, d'autant plus qu'elle n'apparaît que tardivement : on y sent le récit, sinon inventé, tout au moins recueilli par un clerc trégorrois du
XIè siècle, récit qui ne tend à rien d'autre qu'à prouver que Église
de Tréguier a une origine ancienne et que ses évêques ont siégé sans discontinuité; que Tugdual est ainsi le successeur régulier des
68 évêques gallo-romains que la même fable prétend faire siéger à Lexovium, nom supposé du Yaudet, et dont le premier, nommé Drenualus, aurait été disciple de Jésus-Christ et compagnon de Joseph d'Arimatie. La concordance de la mort du dernier évêque Lexovien avec la consécration épiscopale de Tugdual, puis celle de la destruction de la ville suivie du transfert du siège à Tréguier, nous semblent trop providentielles pour être vraies, et
l'on voit que c'est là un arrangement factice de faits historiques
qui, à l'époque de la rédaction de la « Vila Tertia », n'étaient plus très clairement connus.
Enfin le silence à ce sujet des deux premières Vies ne permet absolument aucun doute.
Que Vêtus Civitas ait été détruite à cette époque, cela est à peu près prouvé; mais sa ruine est sûrement antérieure, à l'élévation de Tugdual à l'épiscopat. La preuve en est précisément que, s'il y avait eu un
évêque gallo-romain siégeant dans la cité du
Yaudet, Childebert n'aurait pas fait sacrer un évêque breton qui devait résider à quelques lieues seulement de l'évêque légitime, situation anormale qui n'eût pas manqué d'être une source inévitable de graves conflits de juridiction : c'est la logique même. Pour cette raison, nous pouvons donc affirmer que Vetus Civitas était détruite et qu'il n'y avait plus d'évêque gallo-romain quand Tugdual fut consacré. Quand et comment avait-elle été détruite
? Nous l'ignorons complètement. Cette destruction pouvait alors être très récente, elle avait probablement été l'œuvre des pirates saxons qui ne limitaient pas leurs incursions à la Grande-Bretagne, mais c'était sûrement alors un fait accompli. Et le siège épiscopal qui avait pu exister au
Yaudet depuis son érection en cité avait disparu avec la ville il n'y avait plus d'évêque en cette région de l'Armorique le
geste de Childebert le prouve : il s'agissait alors d'instituer dans ce pays un nouveau pouvoir épiscopal. Nous ignorons et nous ne saurons jamais le nombre et le nom des évêques qui ont pu siéger au
Yaudet durant sa brève existence de cité, mais il est sûr qu'il n'y en eut
que quelques-uns, puisque cet évêché, si réellement il exista, ne subsista
certainement pas plus de 75 ans, peut-être même beaucoup moins.
...
page 40 : " ... De cette aventure racontée dans la
"Vita Tertia", nous ne retiendrons que le nom que
pouvait porter Vetus Civitas, et que l'hagiographe a rendu en
latin par Lexovium, et l'existence probable d'un évêché
gallo-romain dans cette cité du Yaudet avant sa destruction".
*****
pages 212 et suivantes : " D'assez nombreux restes de voies romaines ont cependant été recensés, principalement, dans la région de Lannion, c'est-à-dire
aux approches du Yaudet. (les anciennes voies romaines furent utilisées encore pendant une partie du
Moyen Age et elles auraient plus particulièrement servi aux pèlerins du «
Tro-Breiz ».
Nous avons suffisamment parlé, dans la partie historique de cet ouvrage, de
Cox-Yaudet, le « Vetus Civitas » des anciens textes, le « Lexovie » de la tradition. D'après Gaultier du
Mottay (« Répertoire Archéologique », article Ploulec'h, page 282), M. de Penguern avait dressé en 1841 un relevé des murailles de
l'oppidum de Coz-Yaudet. Il est probable que le site du Yaudet, s'il était l'objet de fouilles méthodiques sur une vaste échelle, livrerait des vestiges qui
permettraient de lever un coin du voile qui recouvre le problème de Vetus
Civitas; et peut-être même d'en révéler le nom gallo-romain exact.
En effet, jusqu'à présent les recherches n'ont été
que très partielles, mais elles sont néanmoins très encourageantes.
M. Fleuriot, professeur d'histoire, a présenté le mercredi 4 septembre 1957 aux membres du Congrès de la Société d'Histoire, et d'Archéologie de
Bretagne qui se tenait à Lannion le résultat de ses recherches sur le site de
Coz-Yaudet.
En premier lieu, il y eut en cet endroit une importante station préhistorique. De cette station il subsiste un rempart de terre qui barrait l'éperon entre le Léguer au nord et la petite haie formée par la mer au sud; c'est un important rempart formé de pierres sèches recouvertes de terre; il isolait ainsi le promontoire dont il assurait la défense.
A l'intérieur de cette enceinte, une éminence porte une grande roche plate, approximativement carrée, que supportent d'autres roches debout sur cette roche est
gravé un cercle avec des rayons, en forme de roue. Selon certains archéologues, ce cercle serait une représentation du soleil, et nous serions ici en présence des restes d'un ancien monument préhistorique, un autel peut-être, qui aurait servi aux sacrifices.
Cette interprétation est d'ailleurs contestée par d'autres archéologues
qui ne veulent voir dans celle figure qu'un cercle de cadran solaire
relativement récent. Cependant on ne peut pas à notre avis
contester que ces roches aient été disposées ainsi par le travail des hommes à une époque ancienne.
Au point de vue gallo-romain, il y a le long de la rive gauche du Léguer un important fragment de mur
qui s'étendait sur une centaine de mètres environ, à pic sur la rivière, mais ce mur s'est écroulé en partie. Dans ce mur s'ouvre une
porte dont les fouilles ont mis à jour le soubassement et qui à conservé l'un de ses
gonds en plomb. Cette porte donnant accès directement sur la falaise qui borde la rive gauche du Léguer et qui est élevée d'environ dix mètres à pic sur la rivière, cela
fait supposer que celle-ci a rongé sa berge au cours des siècles, provoquant ainsi la chute d'une partie du mur, et qu'autrefois, à l'époque
gallo-romaine, il devait y avoir une pente plus douce sur la rivière, la présence de la
porte en cet endroit ne pouvant plus s'expliquer dans les conditions actuelles.
Deux époques se discernent dans les restes de murs de cette porte : l'un, sans chaînage de briques, date d'environ 50 après Jésus-Christ; une destruction partielle de la cité aurait eu lieu vers 250 après Jésus-Christ.
La partie supérieure, plus récente, daterait de l'époque où l'on releva les murailles; moins épais que le mur ancien, cet autre mur comporte des chaînages de briques. D'autres vestiges de murs gallo-romains ont été également décelés en plusieurs autres endroits.
Les fouilles ont donné quelques objets gallo-romains (poteries, ferrures). L'une de ces poteries porte même le nom du
potier Attilianus et date d'environ 150 après Jésus-Christ.
La cité gallo-romaine du Yaudet, Vetus Civitas, fut détruite par le feu; les fouilles ont révélé qu'elle comprenait vraisemblablement beaucoup de constructions en bois, brûlées lors de cette seconde destruction. D'autre part bien des maisons de l'agglomération actuelle sont bâties avec d'anciennes pierres taillées gallo-romaines présentant des traces de feu. Cette cité gallo-romaine était uniquement un poste militaire établi dans cet endroit facile à défendre, pour surveiller l'estuaire du Léguer et la côte et barrer la route aux invasions saxonnes. Elle ne possédait évidemment pas les beaux et vastes monuments des grandes cités gallo-romaines comme Autun. Arles, etc.
Il ressort des vestiges exhumés que la seconde
destruction du Yaudet aurait eu lieu très tôt, au moins deux siècles avant les invasions normandes. Déjà, au siècle dernier, certains historiens avaient noté cette
disparition précoce de Vetus Civitas. C'est ainsi qu'Aurélien de Courson, dans l'ouvrage « La Bretagne
Contemporaine », écrivait en 1865 (« Côtes-du-Nord », page 66), au sujet de la destruction supposée de Coz-Yaudet par les Normands soutenue par quelques auteurs : « II est plus que probable que cette destruction, comme celle de Corseul, remonte à une époque beaucoup plus reculée, car pas une des monnaies romaines trouvées de ce côté n'est
postérieure au règne de Valens. » Or Valens fut empereur de 364 à 378.
Tout ceci confirme ainsi l'opinion que nous avons émise dans la première partie de cet ouvrage, à savoir que la destruction de Vetus Civitas eut lieu en toute vraisemblance avant l'élévation de Saint-Tugdual à l'épiscopat, c'est-à-dire avant l'année 540. Les fouilles archéologiques dans leur état actuel semblent donc bien confirmer les
hypothèses basées sur les données historiques. Vetus Civitas aurait cessé d'exister avant le milieu du
VIè siècle; cette destruction ayant entraîné la disparition du siège épiscopal qui devait y exister depuis 75 ans tout au plus, Tugdual aurait ainsi été sacré
évêque lors de son voyage à Paris auprès du roi Childebert et se serait établi dans son monastère de Tréguier afin de remplacer le siège épiscopal gallo-romain du Yaudet alors récemment disparu.
Il est donc souhaitable que les recherches continuent en s'amplifiant pour nous révéler les secrets que cache toujours le promontoire du Yaudet en mettant au jour les vestiges du seul établissement gallo-romain important de la côte trégorroise". |
*****
* De La Haye et Briand (1986), p. 15 : "Le Yaudet passionne les archéologues depuis bien des décennies. On y fait toujours de fructueuses découvertes. Et longtemps encore on cherchera à y percer des mystères, longtemps encore on discutera du nom de
Lec'h ou de Lexobie que l'antique cité aurait ou n'aurait pas porté, les opinions varient à ce sujet, avant sa dévastation et l'implantation en ses murs écroulés d'immigrés insulaires.
De très nombreuses monnaies et médailles, des débris de statuettes, de poterie domestique, des épées, des urnes cinéraires, des fragments de construction dont les pierres sont noyées dans un ciment réputé, des tuiles à rebord, un emplacement de port, quelques traces de l'emploi du marbre, des tronçons de routes pavées, tout cela témoigne de l'importance du rôle tenu par Le Yaudet gallo-romain.
Un mot des monnaies : la grande majorité se rapporte soit à la seconde moitié du Ille siècle, époque des empereurs gaulois, soit au dernier tiers du IVe. Les premières sont un mélange de pièces frappées à l'effigie aussi bien des empereurs gaulois que des empereurs romains.
Des routes pavées dont les traces subsistent, retenons celles de Carhaix à La Roche-Derrien-Tréguier (qui franchit le gué de Buzulzo à Lannion) de Lannion à Trégastel-Perros. Lannion n'en demeure pas moins un village, encore anonyme, qui s'est quelque peu développé vraisemblablement.
On y a mis à jour des monnaies en plusieurs endroits, des tuiles à crochet sur le Forlac'h et dans « l'enclos des
Ursulines » qui lui est proche, un aqueduc (insuffisamment examiné, malheureusement) sous la maison dite des Trois-Avocats, de nombreux débris autour du pont de
Kermaria
Quand au Ve siècle se disloque l'Empire romain d'Occident, l'Armorique (notre actuelle Bretagne) vit une période confuse, peut-être avec une crise démographique, et, à la faveur de ces conditions, commence l'immigration des Bretons insulaires (habitants des Iles Britanniques : Angleterre, Pays de Galles,
Écosse, Irlande), Cette immigration est provoquée par des invasions saxonnes dans les Iles Britanniques, invasions facilitées par les querelles intestines. La population insulaire qui arrive en Armorique, notamment sur son littoral nord, apporte sa langue
(le breton), les noms individuels des réfugiés qui vont se transformer en noms de famille, sa culture, ses usages, sa propre civilisation. Elle façonne des noms de lieu bien caractéristiques, dont Lannion qui subsiste outre-Manche (par exemple Lanyon en Cornwall). Elle apporte aussi ses idées religieuses et ses légendes. S'il est possible que la population gallo-romaine de notre région ait été un peu christianisée avant l'immigration, il est sûr que l'évangélisation généralisée est l'œuvre des émigrés insulaires dont Efflam, Tugdual, Brieuc,
Guirec, Samson.
Un évêché au Yaudet ? La tradition selon laquelle y résida saint Dréno (en latin
Drenalus), neveu et disciple de Joseph d'Arimathie, vaut d'être rappelée, mais point que l'on s'y attarde. Disons simplement que des évêques bretons, issus des insulaires, séjournent très vraisemblablement au Yaudet sans en faire un siège épiscopal fixe, ce qui serait contraire à leurs coutumes. Ce siège fixe sera établi à Tréguier au IXe siècle. Retenons que la «motte» de l'actuel Yaudet sera du domaine de l'évêque de Tréguier et, à ce titre, exempte de certains droits envers le roi (XVIIIe siècle), après l'avoir été envers le duc. Le « mur de pêcherie », sous le nom de « Gorret à l'Evêque », le sera aussi, comme le confirme un arrêt du 9 mars 1746.
Au temps des immigrations des Bretons insulaires, Le Yaudet, jadis fortifié, prospère, puis finalement ruiné, devient «la vieille cité» (Coz-Yeodet, d'où Yaudet). La population autochtone se voit transfuser le sang des Celtes d'outre-Manche, de lointains frères de race, et ainsi elle change d'aspect. Parallèlement le visage du pays évolue, Aux
VIe et VIIe siècles le sol s'affaisse et par conséquent, le niveau de la mer s'élève, ce qui explique que certaines falaises
s'effondrent et que la muraille de la vallée du Pont-Roux s'ensable
et prenne l'aspect banal d'un "mur de pêcherie".
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* Didier Audinot (1997) :
- p. 198 : Environs de Lannion : "De l'emplacement
de la cité romaine de Vetus Civitas.
"Vetus Civitas, littéralement "la Vieille
Cité", est une agglomération gallo-romaine sans doute
construite sur un site encore plus ancien, et qui disparut pour des
raisons et à une époque inconnues, mais après le Vè siècle. A
cette époque, la cité, de simple castrum, était devenue chef-lieu
de Pagus, et siège même de l'évêché. On en traquera les
vestiges à l'ouest de Lannion, vers l'embouchure du Léguer, et
peut-être vers le lieu-dit Coz-Yaudet".
p. 200 : La ville antique de Lexobie.
"On trouve, dans la baie, quelques vestiges de ce que
l'on pense être l'ancienne ville de Lexobie (en latin : Lexovium).
Mentionnée par Pline comme par Strabon, elle devait être d'une
grande importance régionale. L'agglomération se situait là où
l'on peut encore observer un "autel druidique", une
fontaine de forme très singulière, et l'entrée d'un très ancien
souterrain".
p. 200 : La cité perdue du promontoire du Coz-Yaudet.
"En côtes d'Armor, les vestiges des petites villes
protohistoriques ou gallo-romaines sont assez fréquents à
rencontrer. Les restes de l'une d'entre elles occupent ainsi
l'éminence du Coz-Yaudet, en Ploulec'h. On y a découvert de
nombreux objets de la Tène finale, ainsi que des émissions
monétaires romaines et carthaginoises". |
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* Patrick Galliou (2004) : Extrait de : "Les
fouilles du Yaudet ...", par le CRBC et l'UBO (2004).
Compte tenu de l'importance de l'envoi, celui-ci a été publié sur
une page annexe. Pour y accéder, activer le triscèle rouge /
icône ci contre. un lien interne vous permettra de revenir à la
présente page. |
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Commentaire JC Even :
Cette discussion repose essentiellement sur la
confusion entre (Petite) Bretagne (armoricaine), d'une part,
et Armorique d'autre part. Rappelons le une fois de plus : si
la Bretagne est 'armoricaine', c'est parce qu'elle fait
partie de l'Armorique. Mais elle n'est pas l'Armorique à elle toute
seule, puisqu'à l'époque de Dioclétien, l'Armorique désigne de
fait la province lyonnaise deuxième, qui a Rotomagus / Rouen
pour capitale, et englobe toutes les cités situées entre la Loire,
la Seine, la Manche et l'Atlantique, y compris Calètes et
Veliocasses, mais non compris les Carnutes. En conséquence de quoi,
toute interprétation des "saints Bretons venant en
Armorique" restreinte à la Petite Bretagne actuelle,
relève d'une myopie historique caractérisée qui ne mène qu'à
l'impasse et l'incompréhension historique. Lisieux fait donc
partie, elle aussi, de l'Armorique, dans le sens correspondant à
cette époque. Et dès lors, rien n'interdit de voir des
"saints bretons" s'installer dans ce qui sera, bien plus
tard, l'actuelle Normandie, qui n'est en fait, dans ses grandes
lignes, qu'une partie de l'Armorique".
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