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Ogée : Dictionnaire historique et géographique de Bretagne (vers 1780)

 

 

Matignon; trêve de la paroisse de Saint-Germain-de-la-Mer. et petite ville sur un coteau et sur la route de Saint-Malo à Lamballe, passant par le Guildo; à 7 lieues 1/2 à l'E.-N.-E. de Saint- Brieuc, son évêché, et à 15 lieues 1/4 de Rennes. Il s'y tient un marché le mercredi, et quatre foires par chaque année. On y remarque une église collégiale. Les jurisdictions qui s'exercent à Matignon sont : Matignon, haute-justice, à M. de Matignon; la Motte-Colas, basse-justice, à M. le Restif de Tresselin; la Marée-Commast, basse-justice, à M. le marquis de Langeron; le Pont-Quinteul, basse-justice, à M. de Launay; la Roncière, basse-justice, à M. Ville de la Roncière; la Ville-au-Pouvoir, basse-justice, à M. la Motte de Lesnagé; Calan, basse-justice, à M. de Calan.

La famille de Matignon est une des plus anciennes et des plus illustres de la province : elle a possédé de tout temps la ville de ce nom; mais on ne peut décider si ce sont les seigneurs qui ont donné le nom à la ville, ou s'ils l'ont reçu d'elle. A l'égard du nom de Goyon, c'est le nom propre de la famille, qui l'a toujours conservé, et le premier que l'on connaisse était un des premiers bannerets de Bretagne, renommé par ses hauts faits, et surtout par les services qu'il rendit au duc Alain Barbetorte. Ce fut lui qui chassa les Normands de la Bretagne en 937; et, pour mettre le pays à l'abri des incursions de ces barbares, il fit bâtir sur un rocher, au bord de la mer, un château qu'il nomma Roche-Goyon. Ce château subsiste encore actuellement. Louis XIV le fit augmenter et l'appela le château de la Latte.

On trouve dans les cartulaires des abbayes de Saint-Jacut et de Saint-Aubin-des-Bois, fondées par les seigneursde Matignon, et dans les annales de Bretagne, qu'en l'année 1057 Jean de Goyon se trouva aux États assemblés par Eudon, auquel il se plaignit de ce qu'on lui disputait la place que ses pères y avaient toujours occupée, en qualité de premiers bannerets de la province. (Voy. la pièce en vers français, composée par un moine, l'an 1312, touchant l'ordre et l'origine des bannerets eu Bretagne; pièce que N. de Brieux a fait imprimer à Caen. Voyez aussi le règne de Louis XIII, dans l'Abrégé de l'histoire île Bretagne, t. 1 de ce Dictionnaire. )

En 1095 fut arrêtée au concile de Clermont, tenu par le pape Urbain II, la célèbre croisade contre les infidèles. Alain Fergent partit pour la Palestine avec un grand nombre de chevaliers bretons, parmi lesquels était Etienne de Goyon. Ils se trouvèrent à trois batailles, et furent des premiers à entrer dans Jérusalem, que les chrétiens prirent d'assaut. Ce voyage dura six ans, après lesquels Etienne, de retour en Bretagne, fonda le prieuré de Saint-Valeri, près la petite ville de Matignon. Denis Goyon donna beaucoup de biens à l'abbaye de Saint-Jacut. — Guignes et Seldivin de Goyon se trouvent compris dans la liste des chevaliers et écuyers qui furent pris, l'an 1177, par Henri II, roi d'Angleterre, lorsqu'il s'empara du château de Dol. - Etienne Goyon, chambellan de Bretagne, seigneur de la Roche-Goyon et autres lieux, épousa, l'an 1180, Louise, dame de Matignon. Ils eurent cinq enfants de leur mariage. Ces deux époux firent plusieurs fondations à l'abbaye de Saint-Aubin-des-Bois. La première porte qu'Etienne, leur quatrième fils et ses successeurs, auront le droit de nommer un religieux à cette abbaye; la seconde, qui est datée de l'an 1214, porte que, du consentement de leurs enfants, ils confirment les donations précédemment faites à cette maison, à laquelle ils donnent la dîme de la paroisse de Saint-Potant, tant pour eux que pour le salut des âmes de Geoffroi, Etienne et Jean, leurs enfants, qui étaient morts. Damette de Matignon fit, en 1218, une donation à l'abbaye du Mont-Saint-Michel. Jean-Geoffroi, cinquième fils d'Etienne de Goyon et de Louise de Matignon, épousa Marguerite de Plancouet. Ce seigneur fut un des gentilshommes députés par les Etats assemblés à Vannes, en 1203, au roi Philippe-Auguste, pour le supplier de venger la mort du duc Artur, qui avait été assassiné, le 3 avril de cette année, par son oncle Jean Sans-Terre, roi d'Angleterre.

Hugues Goyon, seigneur de la Roche-Goyon, était fils aîné d'Etienne Goyon et de Louise, dame de Matignon. Il mourut en 1219, et ne laissa de son mariage avec N... qu'un fils nommé Raoul Goyon, mort sans postérité, et une fille nommée Denise Goyon, dame et héritière de Matignon, qui épousa Robert, vicomte de Merdrignac. Cette dame et son mari firent plusieurs donations, dans les années 1257, 1258 et 1259, aux moines de l'abbaye de Saint-Aubin-des-Bois, qui, en reconnaissance, reconnurent cette dame pour leur fondatrice. L'acte en fut passé l'an 1278. Denise mourut sans postérité, l'an 1284 — Alain Goyon, second fils d'Etienne et de Louise, succéda à Denise, épousa Luce de Roncerie, et remit, l'an 1219, aux moines de Saint-Aubin-des-Bois, certains droits onéreux dont ils s'étaient chargés. L'acte en fut rapporté avec le consentement du vicomte de Merdrignac, et scellé des armes d'Alain Goyon. En 1245, le même Alain fit encore quelques donations au prieuré de Saint-Valeri, fondé par Etienne Goyon à son retour de la Terre-Sainte, et confirma, en 1246, du consentement d'Etienne Goyon, son fils, toutes les donations que ses pères avaient faites à l'abbaye de Saint-Aubin-des-Bois. Au mois d'août 1251, il fit son testament, dans lequel il destina une somme à l'acquit de quelques dettes qu'il avait contractées, et nomma pour exécuteurs testamentaires André, évêque de Saint- Brieuc, l'abbé de Saint-Aubin-des-Bois, le vicomte de Dinan, Luce de Roncerie, son épouse, et deux autres seigneurs. Il pria Robert de Dinan, son intime ami, et Robert, vicomte de Merdrignac, de donner des conseils à ceux qui devaient exécuter ses dernières volontés. L'original de ce testament, qui est scellé de sept sceaux, est encore conservé dans les archives de cette maison. — Alain de Goyon, petit-fils du précédent, transigea, en présence de Denise de Matignon, sa tante, avec les moines de Saint-Aubin-des-Bois, pour les dîmes de la paroisse de Languenan, qui leur avaient été données par son aïeul, et passa un acte avec ces moines, par lequel il s'engagea à leur donner quatre mines de blé par chaque année. Alain de Goyon hérita, l'an 1284, de la terre et seigneurie de Matignon, par la mort de Denise, dame de Matignon, sa grand'tante. Il passa, cette même année, un second acte avec les moines de Saint-Aubin-des-Bois, dans lequel il prend la qualité de seigneur de Matignon. Il eut de Mathilde, son épouse, six enfants, qui sont : Denise, fille aînée; Etienne, son fils aîné, mort sans enfants; Bertrand, qui suit; Alain, mort l'an 1305, que l'on voit représenté en habits sacerdotaux, sur une pierre auprès du grand autel de l'église paroissiale de Matignon; Pierre et Philippe, dont il est fait mention dans une fondation faite, l'an 1339, dans l'église de Matignon.— Bertrand Goyon, troisième fils d'Alain, épousa Jeanne de la Roche-Derien, dite de Bretagne, et fonda, en 1323, une chapelle dans l'église de Matignon, qu'il dota de vingt-cinq mines de blé par chaque année. Il laissa de son mariage trois enfants, qui sont Etienne, Pierre, qui prit l'habit ecclésiastique, et Louis, qui combattit à la bataille des Trente. Ce dernier épousa Jeanne, dame de Beaucorps.— Etienne Goyon succéda à Bertrand Goyon, son père, aux seigneuries de Matignon et de la Roche-Goyon, et accorda, en 1338, aux moines de l'abbaye de Saint - Jacut, les franchises aux foires et marchés de Matignon, pour tous les hommes vassaux de cette abbaye. Il fonda deux chapelles dans l'église de Matignon : la première, en 1339, avec Pierre et Philippe de Goyon, ses oncles, et la seconde, en 1342, avec Pierre de Goyon, son frère. Etienne Goyon fut capitaine du château de Jugon, et un des plus zélés serviteurs de Char-

les de Blois et de son épouse, qui lui donnèrent, pour récompense de ses services, le domaine de la ville d'Haméon, par lettres du 20 février 1341, dans lesquelles le prince et la princesse le qualifient de notre très-brave cousin et féal chevalier banneret M. Etienne Goyon, sire de Matignon. En 1353, il fut compris dans une commission que donna Jeanne de Bretagne pour la délivrance de Charles de dois, son mari, qui avait été fait prisonnier à la bataille de la Roche-Derien. Le comte de Montfort, pour le punir de l'attachement qu'il avait pour les Penthièvre, le dépouilla de sa seigneurie de la Roche-Goyon. Etienne Goyon avait eu deux femmes : la première se nommait Jeanne, et la seconde, nommée Allix de Painel, descendait par Marguerite d'Avaugour, sa mère, des comtes de Penthièvre. Il eut de ces deux mariages Alain; Alix, épouse de Guillaume de Coëtquen; Mahaud, épouse de Bertrand de Montboucher, seigneur du Bordage; Renée, épouse de Sylvestre Eudes, seigneur d'Uzel, et Marguerite, épouse en premières noces de Sylvestre du Cambout, et en secondes noces de Thomas Gerevaux, seigneur du Canevet. — Alain Goyon, successeur d'Etienne, son père, dans la seigneurie de Matignon, épousa Jeanne d'Avaugour, et mourut en 1363. Il laissa de son mariage Bertrand et Etienne. Leur aïeul leur permit de faire leur partage aussitôt après la mort de leur père. Etienne, le cadet, fut capitaine de la ville et château de Rennes, maréchal et amiral de Bretagne, et un des principaux ministres du duc Jean IV. — Les deux frères prirent leurs épouses dans la famille de Montafilan, maison illustre, et Etienne commença la branche de Goyon la Moussaye, en 1374. Le château de la Moussaye est la maison seigneuriale de Plenez-Jugon. — Bertrand eut de son épouse Jeanne de Dinan, fille du seigneur de Montafilan, un fils qui porta le nom de Bertrand comme son père. Celui-ci, parent de Bertrand Dugucsclin, porta la bannière de ce héros à la bataille de Cocherel, en 1364; il le suivit en Espagne, et assista, à son retour, à la procession qui se fit à Rennes, le 2 février 1369, lorsque le duc Jean IV posa la première pierre de l'église et du couvent de Bonne-Nouvelle. Il fut un de ceux dont le roi de France exigea le scellé, pour assurance du traité de paix que ce monarque conclut avec Jean IV. — Bertrand, IIè du nom, avait épousé Jeanne de Rieux, de laquelle il eut un fils nommé Bertrand III, qui rentra, par le traité de Guérande, en possession du château de la Roche-Goyon, dont son bisaïeul avait été dépouillé par le comte de Montfort. Il fut un de ceux qui cautionnèrent le duc Jean IV envers Olivier de Clisson, connétable de France, et fit serment de fidélité au duc, avec les autres seigneurs bretons, le 28 novembre 1393. Il fonda, en 1397, une chapelle dans l'église de Matignon, et fut fait, en 1402, capitaine de la ville et château de Jugon. On croit qu'il mourut en Angleterre, l'an 1407. Il avait épousé Marie de Rochefort, fille cadette de Jean, sire de Rochefort, et de Jeanne d'Ancenis. Ses enfants furent : Jean, qui suit; Matheline, épouse du seigneur de Beaumanoir; Isabeau, épouse de Pierre d'Amboise, et bisaïeule paternelle de la duchesse Françoise d'Amboise; Marie, épouse de Rolland Madeuc, et Lancelot Goyon, seigneur du Lude et chambellan du duc Jean V. Il fit les guerres de Languedoc, avec dix-huit écuyers de sa compagnie, en 1418, accompagna le duc de Bretagne à Amiens, en 1425, et fut fait, peu de temps après, prisonnier de guerre. Le 23 avril 1439, il traita de sa rançon, au paiement de laquelle s'obligèrent les seigneurs de Coëtquen et de Châteauneuf, sous la caution du seigneur de Matignon.— Lancelot Goyon épousa, en premières noces, Isabeau le Moine, dame de Keraesden, morte sans postérité, et, en secondes noces, Sibille de Montboucher, veuve de Pierre de l'Hôpital, seigneur de la Rouardaye, de laquelle il eut Jean, seigneur du Lude, un autre fils et une fille morts sans postérité.

Il existait alors, auprès de Matignon, un bois nommé de la Ville-Hamon, où les seigneurs du lieu allaient ordinairement à la chasse. — Jean Goyon succéda à Bertrand, son père, et fut fait grand-écuyer de France en 1421, et ensuite chambellan du duc de Bretagne Jean V. En 1425, il fit une fondation dans l'église paroissiale de Plevenon, et une autre, en 1431, dans celle de Matignon. L'an 1441, fut faite une transaction, que les moines de Saint-Aubin-des-Bois ratifièrent en plein chapitre, laquelle porte que les religieux de cette abbaye seront tenus de dire plusieurs messes pour les seigneurs de Matignon, et d'envoyer deux moines de leur communauté pour dire la messe, les jours de grandes fêtes, au lieu où se trouveront les seigneurs ci-dessus.— En 1449, arrêt du conseil du duc de Bretagne, qui permet à Jean Goyon de contraindre les gentilshommes voisins du château de la Roche-Goyon, aujourd'hui de la Latte, à la garde de cette place. Il mourut au mois de février 1450, laissant de son épouse Marguerite, fille d'Olivier de Mauni, baron de Thorigni, cinq enfants, qui sont : Bertrand, Alain, Marie, Jeanne et Isabeau. Comme la mère de ces jeunes seigneurs était de Normandie, leur famille s'y établit et n'en est plus sortie.— Marie Goyon épousa Richer d'Epinay, mort sans postérité. Jeanne se maria d'abord à Rolland Madeuc, et, après la mort de celui-ci, à Jean de Couvran. Isabeau épousa Gui, seigneur d'Epinay et de la Marche.— Alain, sieur de Thieuville et de Villars, fut grand-écuyer de France, et servit fidèlement le roi Louis XI. Ce fut lui qui commanda la noblesse lorsque ce monarque fit son entrée à Paris. Le roi Charles VIII le continua dans la dignité de grand-écuyer, et le fit conseiller d'Etat, chambellan et chevalier de son ordre. Il mourut en 1490, emportant au tombeau l'estime générale. Son corps fut enterré dans l'église du Saint-Sépulcre de Caen, ville dont il était gouverneur. Son tombeau fut détruit par les protestants. — Bertrand Goyon, IVe du nom, successeur de Jean de Goyon, son père, fut fait grand-chambellan du duc Jean V. Il épousa Jeanne, fille aînée de Jean, seigneur du Perrier et de Quintin. Il s'attacha, à l'exemple de son frère Alain, aux rois de France Charles VII et Louis XI; signa, comme parent, au mariage de Marguerite, fille du duc François Ier, avec François, comte d'Etampes; fut fait chambellan ordinaire du roi Charles VII en 1451, et, en 1460, conseiller et chambellan du roi Louis XI. Le duc de Bretagne lui confirma, le 20 mai 1468, le privilège, déjà accordé à sa famille, de se délivrer des plaids généraux de Lamballe. II mourut le 3 septembre 1480, laissant de son mariage trois enfants, qui sont : Gui, l'aîné; Jean, seigneur de Bois-Glé, et François, seigneur de la Ville-Bagues.

Gui, successeur de Bertrand, son père, chambellan du duc de Bretagne, quitta le nom de Goyon pour prendre celui de Matignon. Louis XI, en considération de ses services et de ceux de ses ancêtres, lui fit épouser la marquise de Laval, le fit son conseiller et son chambellan, et lui donna la prévôté de Caen, par lettres du 14 octobre 1479. Le duc François II le qualifia du titre de son grand-chambellan, dans les lettres qu'il lui fit expédier le 15 mai 1485, pour lui permettre de lever, sur les droits de billots, certains deniers qui devaient être employés aux réparations et fortifications de son château de la Roche-Goyon; et, par arrêt du 24 août de l'année suivante, il fut nommé seul chambellan du duc.

Le château de la Roche-Goyon, aujourd'hui de la Latte, par sa position sur le bord de la mer, sert souvent d'asyle aux vaisseaux poursuivis par les corsaires ou vaisseaux de guerre ennemis. Les Anglais l'assiégèrent inutilement en 1490. Gui Goyon mourut en 1497, laissant de Péronne, fille aînée et héritière de Jean, seigneur de Jeucourt, trois enfants, qui sont : Joachim, Jacques et Anne, épouse de François l'Epervier, seigneurde la Bouvardière, près Nantes. Joachim, chevalier, seigneur de Matignon, conseiller, chambellan du roi François Ier, et son lieutenant-général en la province de Normandie, épousa Françoise d'Aillon du Lude, veuve du seigneur de Rohan, de laquelle il n'eut point d'enfants, et mourut le 9 octobre 1549. Jacques de Matignon, son frère cadet, fut colonel général des Suisses et rendit des services importants à la France, en donnant avis au roi des desseins et de la retraite du connétable de Bourbon. Le monarque, pour le récompenser, lui donna la baronnie de la Rochetesson. Ce seigneur mourut en Piémont, où il commandait les Suisses, en 1337, laissant de son épouse Anne, fille aînée et héritière de François de Sili, seigneur de Longray et du Fay, deux enfants, qui sont : Jacques de Matignon, et Anne, épouse du seigneur de Maridor, seigneur de Vaux. Jacques de Matignon fut élevé enfant d'honneur auprès du roi Henri II, qui n'était pour lors que dauphin; il lui rendit de grands services, de même qu'aux rois Henri III et Henri IV. Ce gentilhomme s'acquit l'estime des Français et de son maître, qui le confirma, l'an 1575, dans la charge de lieutenant-général en Normandie, et lui donna, trois ans après, le gouvernement de Cherbourg. Le 14 juillet 1579, il reçut le bâton de maréchal de France, commanda, l'année suivante, l'armée de Picardie, et réduisit cette province à l'obéissance du roi. Toutes les entreprises du maréchal lui réussirent heureusement : il ne fit que marcher de victoires en victoires. En 1587, Henri III lui donna le collier de ses ordres; et, après la mort de ce monarquie, il fut pourvu du gouvernement de la Guyenne, d'où il écrivit à Henri IV pour l'engagera hâter l'instant de sa conversion. Il défit l'armée des Espagnols, prit plusieurs places, et, malgré les efforts de la Ligue, il vint à bout de mettre Bordeaux et toute la province sous l'obéissance du roi. Il obligea même le parlement de cette ville, qui se servait des sceaux de Henri III, à se servir de ceux de Henri IV; fit les fonctions de connétable au sacre de ce dernier monarque, à Chartres, le 27 février 1594, et, à la reddition de Paris, il entra dans cette capitale à la tête des Suisses qu'il commandait. Le maréchal de Matignon mourut couvert de gloire dans son château de l'Esparc, en 1597. Son corps fut porté à sa terre de Thorigni en Normandie, où il fut inhumé. On y voit encore son tombeau, qui est de marbre blanc. Il eut de Françoise d'Aillon du Lude, son épouse, cinq enfants, qui sont : Odet, Charles, Lancelot, Gillonne et Anne. Odet, comte de Thorigni, épousa, en 1586, Louise, comtesse de Maure, fille de Louis, comte de Maure, morte sans postérité. Ce seigneur, aussi célèbre que le maréchal son père, mourut à l'âge de 36 ans, le 7 août 1595. Henri IV le visita pendant sa maladie, et lui fit expédier le brevet d'amiral de France. Lancelot mourut jeune. Gillonne épousa Pierre d'Harcourt, marquis de Beuvron; et Anne se maria à René Carbonnel, marquis de Casini. Charles de Matignon, gouverneur de Granville, de Cherbourg et de Saint-Lô, et lieutenant-général pour le roi dans la province de Normandie, épousa à Rouen, en 1596, Eléonore d'Orléans, fille du duc de Longueville et de Marie de Bourbon, vicomtesse de Saint-Paul, cousine-germaine d'Antoine, roi de Navarre, père d'Henri IV. Ce monarque lui accorda un brevet de maréchal de France, dignité dont il ne jouit pas. Il mourut le 8 juin 1648, et laissa six enfants; les plus connus sont : 1° Jacques de Matignon, élevé enfant d'honneur auprès du roi Louis XIII, et tué en duel par le comte de Bouteville; il n'eut point d'enfants d'Henriette de la Guiche, son épouse. 2° Aliénor de Matignon, abbé de Lessay, pourvu de l'évêché de Coutances en 1622; puis évêque-comte de Lisieux, et commandeur des ordres du roi en 1646. 3° François de Matignon, comte de Thorigni. Celui-ci accompagna le roi en Savoie en 1629, fut fait chevalier de ses ordres en 1632, et mourut le 19 janvier 1675, laissant d'Anne de Malon de Bercy, fille du président de Bercy, douze enfants, qui sont : Henri qui suit; Léonor de Matignon, abbé de Lassi, évêque-comte de Lisieux et aumônier du roi; Charles, comte de Gacé, mort d'une blessure qu'il reçut à la bataille de Senef; Jacques, évêque de Condom; Jacques, comte de Thorigni; Charles-Auguste, comte de Gacé, maréchal de France; Eléonore, prieure des Bernardines de Thorigni et abbesse du Paraclet; Marie-Catherine, abbesse de Cordillon; Henriette, religieuse dans ce dernier monastère; Charlotte, abbesse de Saint-Désir, près Lisieux; Marie-Françoise, épouse du comte de Coigni, et Anne, épouse du marquis de Nevet, morte sans enfants. Henri, chevalier, seigneur de Matignon, épousa Françoise, fille unique et héritière de François le Tellier, marquis de la Luthumière, de laquelle il eut neuf enfants, qui sont : Louis-Charles, François et Eléonore, morts jeunes; Eléonore-Marie-Francoise, Anne, Gabrielle et Claude, religieuses, cette dernière abbesse; Charlotte, épouse de Jacques de Matignon, comte de Thorigni, son oncle, et Catherine-Thérèse, épouse en premières noces du grand Colbert, et en secondes noces de Charles de Lorraine, comte de Marzan. Jacques de Matignon, comte de Thorigni, chevalier de Malte en 1651, lieutenant-général des armées du roi en 1693, et chevalier de ses ordres, épousa par dispense Charlotte, sa nièce, fille de Henri de Matignon, de laquelle il eut François-Léonor-Jacques de Matignon, comte de Thorigni, et Catherine-Elisabeth de Matignon, qui épousa par dispense Jean-Baptiste de Matignon, son cousin-germain, fils du maréchal de Matignon. Charles-Auguste de Matignon, sixième fils de François de Matignon, comte de Thorigni, et père du précédent, fut fait lieutenant-général en 1693, et commandant des troupes que le roi envoya, en 1708, en Ecosse avec le roi d'Angleterre, auprès duquel il eut le titre d'ambassadeur extraordinaire et de généralissime. Le 13 février, il fut fait maréchal de France avant l'embarquement des troupes. Louis-Jean-Baptiste de Matignon, fils de ce dernier, n'eut point d'enfants de sa première femme et se remaria en secondes noces avec Marie-Anne-Eléonore Dreuse, fille du marquis de Chàteaurenaud, vice-amiral de France et lieutenant-général au gouvernement de Bretagne, de laquelle il eut plusieurs enfants qui moururent jeunes. François-Léonor-Jacques de Matignon, comte de Thorigni, fils de Jacques et de Charlotte de Matignon, né au mois de novembre 1689, fut mestre-de-camp du régiment Royal-Etranger, cavalerie, et mourut en... Léonor Goyon de Matignon fut nommé évêque de Coutances en 1721, et mourut en 1737, dans la quatre-vingtième année de son âge. Jean-Louis Goyon de Vaudurand fut évêque de Saint-Pol-de-Léon en 1745.

Le territoire de la paroisse de Matignon renferme plusieurs fiefs qui relèvent de sa majesté, et les maisons nobles suivantes : les châteaux Duval, de Beaulieu, de Galinée, de la Chesnaye-Tanio, la Ville-Saloux et la Brousse.

 

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